En 1980 eut lieu l’un des paris les plus célèbres de l’histoire des sciences. Le biologiste Paul Ehrlich prédit que la croissance rapide de la population contribuerait à la raréfaction des ressources minérales. L’économiste Julian Simon pensait au contraire que l’humanité ne manquerait jamais de minéraux, car des prix plus élevés stimuleraient la recherche de nouvelles réserves ou de nouvelles façons d’économiser l’utilisation des ressources. Nous savons que le niveau des prix ainsi que sa variation dépendent de la situation de rareté relative sur un marché : un accroissement de la rareté d’un produit induit une augmentation du prix, l’offre chutera et le prix aura tendance à augmenter. Ehrlich fit le pari avec Simon que le prix d’un panier de cinq matières premières (cuivre, chrome, nickel, étain et tungstène) augmenterait en termes réels au cours de la décennie.
Le 29 septembre 1980, ils achetèrent tous les deux 200 dollars de chacun des cinq produits de base (pour un pari qui, donc, a engagé une dépense de 1 000 dollars). Ils avaient convenu que si le prix de ces ressources augmentait plus rapidement que l’inflation sur la décennie à venir, reflétant ainsi une rareté accrue, Simon payerait à Ehrlich la différence entre les prix réels (prix ajustés de l’inflation) et 1 000 dollars. Si les prix réels, donc déflatés, baissaient, Ehrlich payerait à Simon la différence. Ainsi, si les prix réels augmentaient, Simon perdrait le pari, alors qu’à l’inverse ce serait Ehrlich.
De 1980 à 1990, la population mondiale augmenta de 846 millions d’individus, soit une hausse de 19 %. Durant cette période, le revenu par habitant augmenta de 753 dollars, soit une hausse de 15 % en volume, c’est-à-dire en termes réels après avoir pris en compte l’inflation. Pendant ces dix années, le prix réel des cinq matières premières (cuivre, chrome, nickel, étain et tungstène), corrigé de l’inflation, baissa de 1 000 dollars à 423,93 dollars constants de 2005. Ainsi, ce fut Ehrlich qui perdit le pari et Simon qui le gagna. La croissance rapide de la population n’induisit donc pas la raréfaction des ressources minérales comme Ehrlich l’avait prédit.
Toutefois, les enjeux autour de ce pari entre le biologiste et l’économiste ne doivent pas occulter la réalité d’aujourd’hui, à savoir que la croissance économique est responsable de nombreuses limites écologiques, qui mettent en péril le capital naturel.
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